Travail de mémoire, le poisson rouge

Le poisson rouge a une mémoire d’environ trois secondes … le temps de faire le tour de son bocal rond, au dessus de nos réfrigérateurs ! Donc, rassurez-vous, il ne s’ennuie pas, il ne deviendra pas fou et il est même en pleine admiration de voir les jolies têtes blondes le regarder passer à chaque tour de piste aquatique. Je ne sais comment les scientifiques ont réussi à percer ce mystère qui me taraude depuis des années ; mais j’avais observé aussi le même phénomène dans les entreprises dans lesquelles j’ai travaillé depuis plus de vingt ans. Je suis souvent surpris, parfois consterné, de voir comment de nombreux dirigeants se comportent comme des poissons rouges … les bêtises sont faites, corrigées, et puis au prochain tour de bocal, deux ans plus tard, les mêmes bêtises sont commises à nouveau. C’est quand même un vrai progrès (deux ans versus les trois secondes) avec un génotype commun à plus de quatre-vingt pour cent, avec nos collègues poissons rouges ! La mémoire est un vrai mystère pour les Sciences encore aujourd’hui … pourquoi ces souvenirs extrêmement précis d’évènements passés il y a plus de cinquante ans, alors que nous peinons à nous souvenir de l’endroit où nous avons laissé nos clés, la veille ? Pourquoi nous nous souvenons mieux de chiffres, ou de prénoms, de dates ? ou vice versa ? Les maladies mieux observées dans nos populations vieillissantes, comme l’Alzheimer, sont des angoisses terribles pour nous tous, car elles nous placent face à notre construction de personne, à nos souvenirs accumulés ; et qui pourraient nous échapper. Comment vivons-nous, surtout au soir de nos vies, sinon dans un univers de souvenirs, d’émotions remémorées qui refont surface et se mêlent avec les petits riens de la vie quotidienne ? Un travail de sélection de ces souvenirs s’est effectué, en partie à notre insu, pour nous aider à nous construire, pour nous permettre de développer nos vies personnelles et professionnelles. Mais pourquoi un souvenir plutôt qu’un autre ? Est-ce que notre volonté est à l’œuvre derrière tout cela … Je le crois, même si je n’arrive pas à me souvenir des prénoms des personnes que je rencontre, malgré toute ma bonne volonté … je m’en excuse publiquement. Tout cela reste mystérieux, mais fait partie de notre condition d’homme ; définitivement, nous ne sommes pas des poissons rouges !

Maison d’études sur France Culture

Ce matin, j’écoute Victor Malka, dans son émission de la communauté Juive sur les ondes de France Culture, aux alentours des neuf heures et quart. J’écoutais Victor Malka il y a déjà plus de vingt ans, et j’aime toujours me lever suffisamment tôt pour descendre en pyjama et synthétiser l’émission en buvant mon premier café au lait du matin. Aujourd’hui, l’invité est un professeur d’économie à l’école Centrale de Paris. Il a écrit un opuscule sur la manière de concevoir le monde non-Juif, par des Juifs. L’ensemble n’est pas du plus grand intérêt, au contraire de Dimanche dernier, quand le thème était les tribus Juives perdues de Mauritanie et du Sénégal ; lieux où les empreintes Juives sont encore parfois palpables même si plus aucun d’entre eux ne vit sur ces territoires depuis deux ou trois siècles. A un moment, l’invité de Victor Malka retrace les hésitations du peuple Juif, dans son histoire, entre la vie de fermiers et celle de bergers, entre les sédentaires et les nomades. Depuis, les premiers frères de l’humanité, Caïn et Abel, l’un étant un fermier et l’autre un berger ; depuis cette époque, depuis le début, la rivalité s’est faite jour. Israël a quitté la vie nomade de Chaldée avec Abraham pour s’installer en Palestine, puis l’Egypte où le peuple s’est sédentarisé. Il a ensuite quitté cette vie, pour reprendre son caractère nomade et un jour revenir en terre promise. Depuis dix neuf siècles, l’errance est de nouveau l’apanage du peuple Juif. Dans les entreprises, c’est la même chose, avec d’un côté la Production, la sédentarité et la défense des moyens de production, vis-à-vis des Ventes, qui se tournent vers l’extérieur, qui veulent conquérir des territoires nouveaux, inconnus. Cette rivalité entre Caïn et Abel est actuelle, elle dépasse les cultures et nous invite à une synthèse impossible que le peuple Juif n’a pas su faire, avec ceux qui depuis cinquante années sont revenus s’installer à Jérusalem. Un peu plus tard, je m’aperçois que l’invité est doctrinairement opposé à la mondialisation, à celle des cultures, des langues. Il fait cette déclaration facile, déjà entendue, où il cite les esquimaux qui ont vingt mots pour désigner la neige, et les Français qui en ont aussi vingt pour désigner le vin ; lorsqu’ils se rencontrent, ils ne pourront que communiquer avec les deux mots : « snow » et « wine ». C’est déjà cela ! c’est le rôle ingrat de la langue de communication internationale.

Barcelone

Je retrouve cette semaine Barcelone avec un grand plaisir même si le temps n’est pas de la partie. Il fait en effet une pluie fine, à la Bretonne, sur les édifices élégants et si bien alignés de la capitale de la Catalogne. Ce n’est que la troisième fois que ce congrès du GSM se passe ici, depuis qu’il a quitté les rives de Cannes, mais j’ai déjà pris mes petites habitudes. La ville est à taille humaine, deux millions d’habitants je crois, c’est donc une capitale avec tous ses attributs, mais sans avoir la taille qui rebute parce qu’on ne sait plus en faire le tour. D’ailleurs pour moi, les vraies villes se situent entre les « petites » comme Aix en Provence ou Rennes, où il est encore possible de se balader à pied dans le centre ville, et les « grandes » comme Barcelone ou Marseille, villes encore raisonnables où l’on comprend les articulations de leurs plans, sans se perdre trois fois auparavant. Paris « intra-muros » est encore dans ce cas, imaginable, mais pas son agglomération qui est sortie de l’épure. L’aéroport est immense et moderne, comme des tas d’aspects de cette ville fascinante. Certes, il y a les Gaudi et les Miro, et puis les alentours avec les ombres de Salvador Dali ; mais, ils ont leurs descendants ! Moins connus, parce que l’histoire n’a pas encore fait son tri, mais qui ont continué dans les traces des grands maitres. Les touristes qui viennent à Barcelone sont cultivés et les Barcelonais le sont aussi. On se sent dans une ville d’Histoire et de Culture, ainsi que dans la capitale industrielle de l’une des deux provinces les plus riches des Espagne’s. Car malheureusement, c’est un peu comme cela qu’il faut appeler le pays qui d’une décentralisation prudente après les années de Franquisme, a perdu le contrôle de son agenda en termes de construction d’un état qui pratiquerait un sain principe de subsidiarité dans ses Provinces, au sein d’un état fort, au sein d’une Europe qui se cherche. On entend dire que la Catalogne ou le Pays Basque voudrait présenter leurs équipes de football, dans le concert Européen, à la manière de l’Ecosse ou du Pays de Galle (pour le Rugby). Or, comme nous le savons, le football est un miroir toujours révélateur des pulsions des peuples. Par contre, ce qui risque de changer la donne, c’est la présence d’immigrés Latino-Américains, qui viennent redonner à l’Espagnol des couleurs différentes, mais le renforce face au Catalan, qui se recroqueville dans une bourgeoisie refermée sur elle-même et parfois hautaine. Le matin dans la rue, dans les restaurants et les hôtels, ce sont des Boliviens, des Equatoriens, des Péruviens, qui travaillent et vous servent. C’est une chance pour l’Espagne de redynamiser sa démographie en complète implosion, avec des individus qui ont des capacités multiples et surtout rapides d’intégration. Bref, si INSIDE crée un jour une filiale à Barcelone, je suis candidat pour aller y travailler !

Super Tuesday

Créationniste ou Evolutionniste ? C’est un drôle de débat qui est remis au goût du jour par les candidats, demain, à la Présidence de la République de cet étonnant pays que sont les Etats-Unis d’Amérique. Nous pourrions croire que cet épisode fasse partie de l’histoire ancienne et que les partisans de Darwin aient définitivement gagné la partie … Non ! pas au pays de nos amis d’outre-Atlantique dont la majorité des candidats à la Présidence déclarent être des créationnistes plus ou moins convaincus, comme Georges Bush lui-même. Certes, ils ne vont pas tous faire réécrire les livres de Biologie, pour y changer radicalement les perspectives des découvertes successives de la Science, mais ils insisteront pour y présenter la théorie Créationniste comme une hypothèse valide. Sur ce point, même si je n’y crois pas, j’approuve que le débat soit autorisé à être présenté aux étudiants dans une grande honnêteté et avec la plus profonde liberté d’opinion. Dans ma naïveté, je pensais que le débat actuel se situait toujours dans la lignée des Bergson et des Teilhard de Chardin, qui avaient embrassé l’idée de l’Evolutionnisme, mais se niaient à considérer cette évolution comme uniquement le fruit du hasard. Pour l’un, pour l’autre, avec des nuances subtiles, se pressentait un dessein, un plan divin qui ressurgissait avec force derrière notre apparente solitude dans cette création. Non au hasard pur, non à l’inutilité d’une création qui n’aspirerait pas à la communion avec Dieu ! Sinon, le mieux aurait été de s’arrêter à la fourmi, animal social par excellence, industrieux, insensible aux radiations atomiques, au réchauffement climatique et qui ne présente plus aucun signe d’évolution notoire depuis des centaines de millions d’années. Entre parenthèses, après des catastrophes nucléaires, après des chocs de météorites toujours possibles, la fourmi, sera le premier être vivant qui sortira de terre pour reprendre son bonhomme de chemin, si je peux me permettre cette expression ; le hasard a bien fait les choses, avec la fourmi. Et bien non ! aux Etats-Unis, le débat n’est pas sur l’infinie délicatesse de Dieu qui nous a créé « en continu » au cours de l’histoire de l’Humanité, sans s’imposer de manière évidente, nous laissant ce choix ultime de croire en la dépressive théorie du hasard. Non, aux Etats-Unis, la débat est plus rustre, et les candidats débattent sur le parachutage d’un homme et d’une femme, créés de toutes pièces. Sur le fonds, j’aime aussi beaucoup les belles histoires et je ne vais pas m’en moquer. Mon maitre à penser est toujours Claude Tresmontant, qui a écrit de très belles pages sur la « deuxième création », sur le Nouvel Adam et la nouvelle Eve. Or, Jésus-Christ et Marie, sont des personnages historiques, qui ont foulé les routes de Palestine. Dieu a eu l’infinie délicatesse de penser à une incarnation dans la lignée Humaine, en profond évolutionniste qu’il s’est comporté il y a deux mille ans. Jésus ne s’est pas « parachuté » sur la terre, il a un ADN humain de la lignée de David. Ce n’est pas une nouvelle race au sens biologique du terme. Jusqu’à l’incarnation, Dieu nous a parlé, nous a créé, en insufflant son « ADN divin » à travers Noé, Abraham surtout, les prophètes … la création de l’homme s’est faite par ses promesses, par sa parole insufflée dans l’esprit de ses serviteurs et prêtres. Nous sommes toujours créés aujourd’hui, tous les jours, au sens divin du terme. Notre corps lui, a sa propre évolution ; dans sa magnifique évolution que je crois tirée et voulue par Dieu et non par le hasard, s’est « créée » notre âme, avec des étapes signifiantes comme celle de la création de l’âme d’Adam, puis du Nouvel Adam. Oui, la création existe, elle a connu une étape encore plus inimaginable, il y a deux mille ans et nous en sommes encore les fils et les témoins. Je n’ai jamais vu le problème .. .mais, c’est vrai que les Américains sont forts pour se les créer aussi, les problèmes !

L’Ile

Nous sommes allés voir un très joli film Russe appelé « L’Ile » au cinéma « Lincoln » à deux pas des Champs Elysées, et en famille réduite … seul Jean-Baptiste nous a accompagnés et ne le regretta pas ! Que nous sommes loin des super productions d’Hollywood et de leurs scenarii déjà tout ficelés, tous de la même veine ; et dont bien sûr nous saluons la grève des scénaristes depuis près de deux mois. Ainsi, il y aura plus de place pour le cinéma mondial et la vraie créativité artistique : dans quelques mois, nous pourrons assister à des projections de films intéressants et beaux, grâce à cette grève ! Cet aspect « Art & Essai » du film projeté ce soir, ne signifie pas qu’il soit réalisé sans moyens ; ils sont seulement mis au service de la qualité des images et des prises de vue, à la reconstitution de ce monastère Orthodoxe sur une île improbable dans les froideurs de l’océan Arctique. Car nous ne sommes pas dans l’exubérance des couleurs, loin de là, avec un hiver quasi permanent, de la neige, du lichen , admirablement filmé qui semble vivre devant la caméra, comme frissonnant à chaque rayon d’un soleil subtil. Le déroulé du film n’est pas si important et son histoire n’est que prétexte ; je ne raconterai pas l’histoire, mais la connaitre n’est pas rédhibitoire car l’intensité dramatique n’y est pas liée et un quasi « Happy End » y serait presque incongru. Le point de départ se situe dans les quelques premières minutes du film et toute la réflexion s’en nourrit pendant le reste de la projection. Un peu comme le tas de charbon sur lequel le Père Anatoli continue de vivre et de se chauffer trente-quatre années après le drame. Ce servage du charbon et cette quête continue de chaleur représente la bataille qui se livre dans le cœur du Père Anatoli qui veut à tout prix chasser les démons et trouver le pardon de ses péchés. Il fait participer son supérieur de la congrégation à cette chasse aux démons, dans l’une des scènes tragicomiques de l’histoire, où le père supérieur ne saura que remercier son frère Anatoli de l’avoir libéré des objets qui lui encombrent sa prière et sa relation à Dieu. Magnifique interprétation de l’acteur qui serait un participant d’un groupe de Rock Russe et qui personnifie si bien la prière du cœur des Orthodoxes, celle qui les relie au Judaïsme par la répétition et les mouvements du corps. Incroyable réflexion sur le pardon, qu’on donne, qu’on reçoit et sur lequel le temps n’a ni prise, ni érosion. La vie doit abandonner le superflu et reprendre son sens, non dans la seule contemplation … les va-et-vient incessants de la brouette de charbon du Starets Anatoli sont là pour nous le rappeler.

Le général Santa Anna

Vous connaissez sans doute mon intérêt pour le général Mexicain, Antonio Lopez de Santa Anna! Une personnalité hors du commun, en ce dix-neuvième siècle charnière pour la création des deux Unions d’Etats que seront les Etats Unis d’Amérique et les Etats Unis du Mexique ; toute cette époque déterminant une nouvelle frontière entre les deux Unions, fruit de différentes guerres, de choix d’adoption des populations et parfois, fruit de la supposée trahison d’un homme … Santa Anna!
Beaucoup a été dit sur cet homme qui a perdu la guerre du Texas … pardon, du Coahuila, puisque l’état du Texas n’était alors que la partie Nord de l’état Mexicain du Coahuila! Il a volé l’argent public, puis il a utilisé l’argent qu’il volait pour nourrir les troupes officielles du Mexique ; c’était l’époque, mieux valait se servir avant les autres dans les caisses, et seule l’histoire jugera en fin de compte. Il avait une manière de vivre ses onze présidences de manière assez détachée puisqu’il ne participa pas physiquement à beaucoup des inaugurations de ses mandats, laissant les vice-présidents prendre les responsabilités, alors qu’il allait guerroyer ou se reposer dans son ranch de Jalapa. Une sorte de préfiguration de Georges Bush Junior, en sorte!
Oublions cela et laissons juste ressortir deux aspects plus sympathiques du personnage; le premier sur sa noblesse de vue à son époque, le deuxième sur sa curiosité et richesse d’idées.
Pour le premier aspect, qui n’oubliera pas que lorsque, dos au mur, lâché par les politiques de México, Santa Anna est acculé à vendre le tiers du territoire Mexicain à l’Union du Nord, il a certes empoché une partie de la somme pour aller guerroyer, mais il a aussi demandé des contreparties. Quelles furent-elles? que dans tous les états qui passeraient d’une union à l’autre, ne soit pas instauré l’esclavage et que ne soit pas autorisée la peine de mort !!! L’Espagne avait de la grandeur, face aux arrivistes et pragmatistes du Nord … qu’en fut-il pour les noirs des états du Sud, après la vente ? et qu’en est-il pour l’état qui passe encore des centaines de personnes chaque année sur la chaise électrique plus de cent cinquante années après la parole donnée, les anciens territoires du Nord du Coahuila, aujourd’hui administrée par la famille Bush? Certes, ils sont plus riches que les états de l’union Mexicaine, mais ils n’ont pas respecté leur parole de « caballero » (qui sonne mieux que parole de « gentlemen » dans ce cas).
Le deuxième aspect de Santa Anna est plus ludique ; durant son dernier voyage à New York, Santa Anna modifia sans le savoir les coutumes des habitants du pays qui le recevait. En effet, il employa un jeune homme, James Adams, comme secrétaire et interprète. Ce jeune homme remarqua que Santa Anna mâchait des boules de latex d’un arbre du Yucatan, appelé Chicozapote ou « Chiclè » en Maya (ce qui veut dire la mâchoire qui bouge). A la fin de son séjour, le général lui vendit son stock de « Chiclè ». James Adams inventa un processus pour créer une version synthétique de ce latex, en y ajoutant des édulcorants et il créa bientôt la « Adams Chewing Gum Company »! Une vieille coutume des Indiens du Yucatan, région qui elle aussi, tenta plusieurs fois de se rendre indépendante dans ces années 1850.
Pour les personnes intéressées: www.chicle.com.mx , puisque des entrepreneurs ont recommencé à fabriquer, dans le Yucatan, des vrais « Chewing Gum »!

Création d’entreprises!

Pour couper court à toute mauvaise interprétation, qu’il soit bien clair que je ne suis en aucun cas un adepte des horoscopes, de toute provenance qu’ils soient. Par hasard, je sais que je suis un « Lion » et je ne connais même pas mon ascendance ou les quelconques astres qui sont sensés influencer ma vie professionnelle et sentimentale. Je crois tout à fait que la nature et la création en général, influencent les hommes, que les cycles des saisons peuvent augmenter ou relâcher nos angoisses, nos peurs ou nos motivations ; que nous sommes sensibles à notre environnement, aujourd’hui et dans le passé, mais pas au point de prédestiner notre journée par la position astrale du jour, ô combien important, de notre naissance. Encore plus ridicule pour moi, serait l’horoscope du Bouda qui appela les animaux, une douzaine, avec un cycle ainsi d’années, chacune dédiée à l’un de ces animaux. La seule chose dont je me souviens, c’est que c’est le Rat qui est arrivé le premier à l’appel du Bouda, et que je suis né une année du « Rat » ! Certes le rongeur est considéré non seulement comme rapide, mais aussi très intelligent ; certes, des essais cinématographiques récents comme « Ratatouille » ont encore accru son aspect sympathique, mais il faut l’avouer, cela reste un rat ! Donc, restons en là … sauf que je fus très marqué par une interview que j’ai lue il y a vingt-cinq ans, d’André Truong Thi. Tout le monde connait André Truong Thi, bien sûr, mais au cas où … Né à Saïgon, il étudia au lycée Hoche et créa rapidement une société appelée R2E qui inventa en 1973 le premier microordinateur du monde, appelé le MICRAL, que reconnaissent tous les Américains qui lui ont rendu hommage en faisant trôner le MICRAL à Boston dans le musée des Technologies. Il créa de nombreuses entreprises … tous les douze ans, comme il l’expliquait, chaque année du « Rat », car il était né en 1936, en une autre de ces années de notre ami le rongeur. Et, cela sembla bien lui fonctionner, du moins d’un point de vue professionnel, car le malheureux André Truong Thi est décédé en 2005, après deux années et demi d’hospitalisation suite à une erreur médicale de diagnostic. Donc, 2008, c’est mon année !

Oscar Niemeyer

Oscar Niemeyer, le fameux architecte Brésilien, vient d’avoir cent ans. C’est un nom qui me fait rêver, qui me rappelle l’aventure de Brasilia. Je ne savais pas qu’il était encore vivant et encore moins qu’il était encore si actif … dans sa ville de Rio de Janeiro et dans tout le Brésil ; et qui sait sur d’autres projets internationaux? Avec Delphine, lors de ma première visite à Sao Paulo où je l’avais retrouvée en février 2006, nous avions fait un tour de la ville de Sao Paulo et avions visité les lieux qui lui plaisaient de cette jungle d’asphalte qu’est la ville de Saint Paul du Brésil. Elle m’avait emmené voir ce bâtiment tout en courbes dans le centre ville, avec un restaurant au dernier étage mais surtout composé d’appartements privés. Le bâtiment est ventru par endroits et semble se replier à d’autres. C’est une œuvre d’Oscar Niemeyer, dans les années quarante ou cinquante, une de ses plus connues. Ensuite, au-delà de certaines autres réalisations « cariocas », son nom est lié définitivement à la conception de Brasilia, la capitale du pays, celle qui est sortie de nulle part, de la savane du Sud du Mato Grosso. L’enfilade des bâtiments ministériels, avec ensuite les palais des chambres des députés et des sénateurs ; et en point d’orgue, la Cathédrale de Brasilia, donne le vertige, le sentiment d’un démiurge citadin. J’avais pu admirer cette enfilade depuis le dernier étage de la Banque du Brésil, il y a un an et demi. Certes, nous ne sommes pas devant l’enfilade Parisienne, qui allait des Tuileries jusqu’à l’Arc de Triomphe, et maintenant jusqu’au quartier de la Défense. Mais, c’est l’Histoire de France qui a forgé cet axe formidable de la capitale Française … lorsque cet homme de cent ans aujourd’hui, à dessiné les perspectives de la nouvelle capitales Brésilienne, sur sa table à dessin. C’est ceci qui est frappant et qui donne l’impression de la modernité et de la vitesse d’un pays comme le Brésil. Un homme, encore aujourd’hui vivant, a conçu dans sa tête, une ville qui a largement dépassé le Million d’habitants en 2007. En ce sens, l’architecte est un démiurge, un homme qui crée des espaces de vie, des maisons, des bureaux et même des villes. Ce que je lisais récemment de la ville de Dubaï qui veut recréer un centre équivalent à un quartier de la ville de Lyon !

Mon ami Stéphane

Stéphane Lot est décédé jeudi dernier. Marie-Jo est allée à la soirée de prière qui fut organisée dans cette soirée, immédiatement après l’annonce de sa mort. Marie-Jo me dira ensuite que l’église Saint Symphorien était absolument pleine et que tous les participants étaient en pleurs. Stéphane et son sourire parfois un peu moqueur me hante dans mon sommeil. Notre première rencontre remonte exactement à quarante années, à deux pas de notre maison et de cette église, dans l’école annexe d’instituteurs de la rue des condamines. Je revenais du Gabon et je découvrais la France, avec froideur et anxiété ; l’instituteur nous fait alors écrire nos noms dans nos cahiers de poésie, et, ne comprenant pas la consigne, je regarde au dessus de l’épaule de mon voisin, et j’écris alors consciencieusement dans le coin supérieur gauche : Stéphane Lot. J’ai toujours ce cahier de poésie dans mes affaires, car je l’ai gardé en souvenir de mes premiers pas à l’école, en France. Plus tard, autour du cèdre qui est toujours dans la cour de l’école, je revois les batailles entre les Carullingiens (notre professeur s’appelait Monsieur Carulla) et les Pontoiriens (Mr Pontoire, l’autre classe). Stéphane, le fils d’une famille que l’on devinait un peu stricte à la maison, était donc aussi un meneur d’hommes à l’extérieur, à l’école. Ensuite, je revois surtout Stéphane au lycée Hoche, le lundi matin, qui lisait l’Equipe en déployant le journal à même le sol, sous les tables pour ne pas se faire voir des professeurs. Avec Pascal Personne, c’était un grand amateur de sports et je m’initiais à toute une série d’épopées qui allait de celle des « Verts » de Saint-Etienne à l’adresse d’un « Bowen », alors star du basket mondial. Stéphane avait la tête haute, les yeux rieurs, les deux mains plantées dans sa veste et se préparait à sa vie d’hommes avec un calme et une humeur toujours égale. Puis un jour, ce fut « l’histoire d’un mec, sur le pont de l’Alma » et les années Coluche où nous nous récitions les sketches qui nous faisaient rire aux larmes. « Toi qu’es rigolo, con’te nous une histoire ». J’en aurais des centaines à raconter sur Stéphane durant ces années-là, l’âme d’un groupe de nos années d’adolescence, de nos années de lycée. Stéphane s’est ensuite engagé dans une vie militaire et je quittais Versailles aussi, pour des années. Jusqu’à ce Dimanche, il y a huit mois environ, où nous nous reconnaissions sur les bancs de l’église où nous avions fait notre Confirmation, au milieu des années soixante-dix. « C’est l’histoire d’un mec … qui me fait monter des larmes aux yeux ».

Delphine et ses tribulations

Des nouvelles de Delphine, fraichement postées pour toute la famille …
Famille, famille, comment poursuivez-vous le train de vos vacances ? A déterrer les mauvaises herbes du jardin, repeindre les murs, « router » avec Damien et se baigner dans le lac d’Irieux ?Moi je vais bien. Hier et avant-hier j’ai voyagé et ca a été assez fatigant puisque je ne suis arrivée à Passau qu’à 18 heures hier !!! Soit plus de 24 heures de voyage si on compte mon séjour de dix heures à Dijon comme faisant partie du « trip ». Il s’est passé quelques péripéties. Déjá, avant meme de partir de Taizé, j’ai à un moment perdu les Belges de vue et j’ai mis près d’une demi-heure à les retrouver (meme après trois conversations téléphoniques où ils m’indiquaient leur position, mais je ne comprenais rien à leurs explications en franco-néerlandais !!!). J’ai couru comme une folle sous le soleil de plomb et au moment où j’étais la plus désespérée et prete à pleurer, j’ai imploré le Seigneur et il m’a répondu puisque pile à ce moment-là je les ai retrouvés. Ensuite, j’ai bien aimé me balader dans Dijon, c’est une jolie ville aux toutes petites portes. J’y ai croisé des gens de Taizé et une vieille dame qui promenait son toutou dans un parc, avec qui j’ai bavardé (exclusivement à propos du toutou ! Je crois que ca lui faisait plaisir de me parler). Mon bus est arrivé plus tard que prévu, presqu’à une heure du matin et le chauffeur avait une tete de berger tyrolien avec un béret enfoncé jusqu’aux oreilles. Il ne me parlait qu’allemand bien-sur. Il était assez plein (le bus) et la seule place que j’ai trouvé était proche des toilettes… J’ai quand meme dormi et me suis réveillée à Karlsruhe vers 7 heures. Je pensais arriver à Munich vers 11 heures mais je me trompais car il y avait plein de travaux sur la route. On est arrivé sur un parking munichois vers 13 heures et quelques, et il faisait une chaleur à crever. Heureusement il y avait là, dans ce coin paumé, une dame congolaise qui venait chercher sa nièce, laquelle était dans le meme bus que moi et à qui j’avais incidemment preté mon portable (pour qu’elle appelle avec sa propre carte sim). Comme la dame parlait francais je lui ai demandé mon chemin et elle, avec toute la spontanéité un peu rude mais génereuse des Africains, m’a illico embarquée dans sa bagnole pour m’emmener à une station de métro proche de la gare. Elle a aussi embarqué un couple de Togolais, non-german speaking et encore plus paumés que moi. On était donc elle, le couple, la nièce et moi dans la petite voiture avec des bagages qui nous entraient jusque dans les oreilles, c’était assez cocasse. Elle a été vraiment très sympa puisqu’elle m’a expliqué tout le chemin à suivre dans le métro et les phrases à dire en allemand. Arrivée à la Die Bahn Station j’ai acheté un Bayern Ticket à un monsieur pas sympa du tout. J’étais complètement perdue, fatiguée, je ne comprenais rien à la station et aux indications, et mes vetements vieux de la veille étaient trempés de sueur, le top du top ! En plus Rebekka ne répondait pas au téléphone. Heureusement j’ai repéré un point d’info et une fille m’a dit que c’était normal que je sois perdue puisque les horaires avaient changé à cause des travaux. Elle m’a imprimé un travel journey qui m’indiquait les horaires des deux trains et les numéros des voies que je devais prendre pour arriver à Passau. Deux trains ! Et près de quatre heures en tout pour faire 200 km peut-etre. A cette hauteur du voyage le temps ne signifiait plus rien (c’est incroyable comme le temps est élastique quand on voyage sans discontinuer) et j’avais l’impression que mon départ de Taizé remontait à plus d’une semaine. J’ai donc pris les deux trains, sans manger, je n’avais pas faim à cause de la chaleur et de l’inconfort. Heureusement il y avait pas mal de place dans les trains et j’ai pu allonger mes jambes sur ma valoche. J’avais aussi un très bon livre du Cubain Reinaldo Arenas, son autobiographie en fait : Antes que anochezca. Dans le 2e train j’étais dans un wagon avec plein de gosses allemands qui couraient partout et qui criaient en allemand dans tous les coins. Je ne sais pas pourquoi mais les enfants allemands me paraissent toujours en bien meilleure santé que les enfants francais. Malgré la cacophonie (plus un bébé fille qui pleurait, y en a toujours un de bébé braillard dans ces cas-là, pareil dans le bus Dijon-Munich) j’ai très bien dormi, allez savoir pourquoi ! Le paysage était définitement « so bavarian » !!! La dernière demi-heure a été la plus longue car j’avais trop hate d’arriver. Mon T. shirt blanc n’était plus très blanc. Rebekka m’attendait à la gare, fraiche comme un pied de menthe (elle est souvent en vert). Elle avait amené deux byciclettes. Elle a attaché ma valise à roulettes à la queue de son vélo (je ne pariais pas un centime sur le bien fondé du système mais ca a parfaitement marché !). Mon vélo était bien trop haut pour moi mais j’ai réussi à arriver à la maison. Elle vit au dernier étage d’une jolie maison qui en compte quatre (d’étages) en tout. La maison donne sur le fleuve Inn. Son appartement est charmant bien-sur, Rebekka possédant un haut sens esthétique. Il est très lumineux avec des petites fenetres vieillotes qui donnent dùn coté sur le Inn et de l’autre sur une rue pavée. Passau est située au confluent de trois rivières : le Danube, le Inn et la rivière Iltze (je ne suis pas sure de l’orthographe). Quand on monte, comme on l’a fait aujourd’hui, au haut d’une colline où un éveque rebelle a construit un chateau en 1499, on a une très belle vue de la ville (petite et colorée) et du confluent : les trois rivières ont une couleur différente et leur rencontre est très perceptible. Hier soir, après avoir pris une douche réparatrice et mangé un repas aussi esthétique, diététique que bon ( des dattes enroulées dans une jambon fumé et grillées dans une poelle…entre autres. Rebekka est une reine), nous nous sommes baladées au crépuscule dans la ville. Passau est vraiment charmante et petite car restreinte par les trois rivières. Il y a quelques siècles c’était la ville la plus importante de Bavière (Munich n’existait pas) et un carrefour commercial stratégique en Europe. Il y a encore un édifice près du Danube où l’on faisait payer l’impot sur les marchandises qui transitaient par là. Passau était meme un lieu de pèlerinage car il y a une Eglise dédiée à la Vierge (Mariahilfe) sur une des collines qui dominent Passau, où beaucoup de monde venait dans le temps. Le style de la ville est habsbourguien donc baroque et presque hispanique. J’ai vraiment l’impression d’etre à Girona d’ailleurs. Il y a une cathédrale dont l’intérieur est tout en stuc, un peu trop tarte à la crème à mon avis, et plusieurs autres Eglises. L’Hotel de ville date du 15e siècle. Hier soir nous avons poussé jusqu’au campus, qui est tout près. Dans le restau U de l’université il y avait un buffet pour des étrangers qui viennent apprendre l’allemand durant l’été. Il y avait des bières d’ici bien-sur, encore à manger (des trucs bien bavarois) et des vrais bretzels. C’était sympa sauf qu’on a raté la démonstration de danse typique. On n’est pas restées longtemps. Ce matin j’ai dormi comme un loir tandis que Rebekka a eu le temps d’aller à la bibliothèque de l’université et de préparer les pois chiches pour une salade « arabe » (avec une sauce au sésame, au citron et à la menthe extra delicious) que l’on mangera ce soir avec ses amies dans un Biergarten (un jardin de bières ! comment est-ce possible ? On va y faire un barbecue). Aujourd’hui a été une journée bieeen tranquilou, si ca peut te rassurer maman. Le seul moment « sportif » de la journée a été la montée de la colline sous le soleil. Mais ca valait le coup d’oeil. En haut nous avons vu trois jeunes gars qui faisaient de l’escrime. On a un peu déambulé dans la ville, Rebekka me servant de guide. On a l’idée, les jours prochains, d’aller en Autriche à vélo, peut-etre meme jusqu’à Salzburg ! (la ville du sel). On a aussi une idée d’excursion dans la foret bavaroise à deux heures d’ici, au départ de Spiegelau. Enfin, on a la piscine, les amis, des gateaux aux mures à faire, un film brésilien à voir avec une amie de Rebekka, Julia, qui était aussi au Brésil et que j’ai connu là-bas. Ce WE nous irons surement à Munich visiter Katja et Kai, un ami de Rebekka. J’aurais aimé pouvoir voir Cécile, mon amie de Poitiers, qui vivait avec moi la seconde année et qui m’avait emmenée à la rencontre européenne de Taizé à Lisbonne en 2004. Elle a passé un an à Munich, pour faire un stage dans un cabinet d’avocats. Malheureusement je crains qu’elle n’y soit plus. J’espère la revoir à Paris.