Mon ami Stéphane

Stéphane Lot est décédé jeudi dernier. Marie-Jo est allée à la soirée de prière qui fut organisée dans cette soirée, immédiatement après l’annonce de sa mort. Marie-Jo me dira ensuite que l’église Saint Symphorien était absolument pleine et que tous les participants étaient en pleurs. Stéphane et son sourire parfois un peu moqueur me hante dans mon sommeil. Notre première rencontre remonte exactement à quarante années, à deux pas de notre maison et de cette église, dans l’école annexe d’instituteurs de la rue des condamines. Je revenais du Gabon et je découvrais la France, avec froideur et anxiété ; l’instituteur nous fait alors écrire nos noms dans nos cahiers de poésie, et, ne comprenant pas la consigne, je regarde au dessus de l’épaule de mon voisin, et j’écris alors consciencieusement dans le coin supérieur gauche : Stéphane Lot. J’ai toujours ce cahier de poésie dans mes affaires, car je l’ai gardé en souvenir de mes premiers pas à l’école, en France. Plus tard, autour du cèdre qui est toujours dans la cour de l’école, je revois les batailles entre les Carullingiens (notre professeur s’appelait Monsieur Carulla) et les Pontoiriens (Mr Pontoire, l’autre classe). Stéphane, le fils d’une famille que l’on devinait un peu stricte à la maison, était donc aussi un meneur d’hommes à l’extérieur, à l’école. Ensuite, je revois surtout Stéphane au lycée Hoche, le lundi matin, qui lisait l’Equipe en déployant le journal à même le sol, sous les tables pour ne pas se faire voir des professeurs. Avec Pascal Personne, c’était un grand amateur de sports et je m’initiais à toute une série d’épopées qui allait de celle des « Verts » de Saint-Etienne à l’adresse d’un « Bowen », alors star du basket mondial. Stéphane avait la tête haute, les yeux rieurs, les deux mains plantées dans sa veste et se préparait à sa vie d’hommes avec un calme et une humeur toujours égale. Puis un jour, ce fut « l’histoire d’un mec, sur le pont de l’Alma » et les années Coluche où nous nous récitions les sketches qui nous faisaient rire aux larmes. « Toi qu’es rigolo, con’te nous une histoire ». J’en aurais des centaines à raconter sur Stéphane durant ces années-là, l’âme d’un groupe de nos années d’adolescence, de nos années de lycée. Stéphane s’est ensuite engagé dans une vie militaire et je quittais Versailles aussi, pour des années. Jusqu’à ce Dimanche, il y a huit mois environ, où nous nous reconnaissions sur les bancs de l’église où nous avions fait notre Confirmation, au milieu des années soixante-dix. « C’est l’histoire d’un mec … qui me fait monter des larmes aux yeux ».

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