Est-ce si ridicule de collectionner des "magnets"?

Depuis, deux, trois ans, notre réfrigérateur se couvre de nombreux aimants, qui donnent à la porte un aspect moucheté de couleurs qui me laisse songeur lorsque nous dinons le soir, dans la cuisine. La collection, ce n’est pas moi qui l’ai commencée, mais bien Pierre de retour d’un voyage linguistique qui nous ramena une de ces célèbres cabines téléphoniques Anglaises, rouge, avec un décapsuleur intégré, et le tout aimanté manifestement pour une porte de réfrigérateur. C’était le début de la collection, tout au moins en France, puisque nous en avions déjà eu quelques exemplaires au cours de nos années Mexicaines. Marc-André, de retour lui du nouveau monde, revint avec une statue de la liberté, également imposante. Je me pris au jeu, bien sûr, parce que les collections me font toujours vibrer … Je ne suis pas un joueur, très loin de là, mais j’avoue être un collectionneur quasi impulsif. J’aime le côté systématique d’une collection, les traques et les déceptions, mais aussi les satisfactions de mettre la main sur un objet, sur la pièce manquante. D’ordinaire, je ne rapporte que peu de choses de mes voyages aux quatre coins du monde, éventuellement quelques photographies ou des bouts de films, mais rien qui ne me facilite les récits des expériences et anecdotes, dans les dits pays ou villes. J’ai donc peu de chances de pouvoir faire partager tout cela à la famille. A partir d’un objet précis, d’un super concentré de l’âme d’un pays, je suis plus à l’aise pour laisser aller mes souvenirs et les exprimer lors de repas pris en famille. Et c’est vrai que les « magnets » vendus dans les aéroports sont souvent hors de prix, bébêtes et finalement des pièges « à gogos », mais certains représentent le stade ultime de la communication dans laquelle une ville, une société, fait passer un message aux touristes qui viennent la visiter et qui achèteront cet objet inutile. « Que reste-t-il de la communication, quand il n’y a plus qu’un aimant pour la matérialiser ? ». Il y en a qui sont subtils, d’autres plus accrocheurs, des colorés, des moches aux couleurs criardes ; j’aime la petite voiture rouge avec la croix blanche de mon passage à Genève ou le caribou Finlandais avec son thermomètre intégré. Je trouve plus quelconque le dromadaire qui surfe sur des plages impossibles de Dubaï ou les sandales aux couleurs du drapeau Vénézuélien … qu’importe ! Ils sont là, côte à côte, sur le fond blanc et nous les réarrangeons au besoin, pour faire tenir les programmes des candidats au moment des élections, ou tout simplement en les repositionnant selon leurs origines géographiques pour reconstituer la mappemonde. D’aucuns cousaient les emblèmes sur les sacs à dos, d’autres collaient les adhésifs des pays visités à l’arrière de leurs voitures, pourquoi ne pas continuer aujourd’hui en collectionnant ces petits instantanés, qui sont comme des morceaux d’un tableau pointilliste d’une vie de voyages, des détails sans importances qui, collés les uns aux autres, me permettent de me repenser dans mon unité. Oui, je suis allé dans chacun de ces endroits et j’ai pensé, imaginé, rêvé, dans chacun d’eux, le tout que je suis.

Répondre à Anonyme Annuler la réponse

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *